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tentissent au loin. Comment dirais-je les morts dont nous fûmes entourés dans la mêlée des armes ! Ô fille de Toscar, sanglantes étaient nos mains ! Les sombres rangs de Lochlin tombaient comme les rives de la rugissante Cona ! Nos armes furent victorieuses sur Lena : chaque chef accomplit sa promesse. Près du murmure du Branno, souvent tu t’es assise, ô vierge ! ton sein blanc se soulevait fréquemment, comme le duvet du cygne lorsque avec lenteur il nage sur le lac, et que la brise souffle de côté sur son aile frémissante. Tu as vu le soleil se retirer, rouge et lent derrière son nuage ; la nuit s’épaissir autour de la montagne, tandis que par intervalles, les vents rugissaient dans les vallées profondes. Enfin, la pluie bal avec force : la foudre roule en éclats. L’éclair jaillit sur les rochers : les esprits montent sur des ravons de feu. L’impétuosité du torrent des montagnes descend en rugissant du sommet des collines. Tel était le bruit du combat, ô vierge aux bras de neige ! Mais pourquoi, fille de Toscar, pourquoi cette larme ? C’est aux filles de Lochlin à pleurer, car les guerriers de leur patrie ont succombé ! Sanglantes étaient les armes bleues de la race de mes héros ! Mais je suis triste, aveugle et délaissé ; je ne suis plus le compagnon des héros ! Donne-moi, ô jeune et douce vierge, donne-moi tes larmes ; car j’ai vu les tombes de tous mes amis !

Ce fut alors qu’avec douleur, Fingal vit un héros tomber sous sa main. Le guerrier en cheveux blancs roulait dans la poussière, et vers le roi levait ses yeux mourants, « Et c’est par moi que tu meurs, ami d’Agandecca, s’écrie le fils de Comhal ! J’ai vu tes larmes pour la vierge de mon amour, dans les salles du sanguinaire Starno ! Tu fus l’ennemi des ennemis de mon amour, et tu uicurs de ma main ! Élève Ullin, élève la tondre de Mathon, et dis son nom dans les chants d’Agandecca. Tu fus chère à mon