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reux amant, je lui tranchai la tête : cinq fois je la secouai par les cheveux : les amis de Cormac s’enfuirent. Quiconque m’eût dit, ô jeune et douce fille, alors que je luttais dans les combats, qu’aveugle et délaissé je passerai mes nuits dans la solitude, aurait eu besoin d’une armure impénétrable et d’un bras sans rival dans la guerre ! »

Mais déjà sur la plaine de Lena, s’est éteinte la voix de la musique. La brise inconstante soufflait avec force et le chêne élevé agitait ses feuilles autour de moi. Mes pensées étaient d’Éverallin, lorsqu’elle m’apparut dans toute la lumière de sa beauté. Ses yeux bleus roulant dans les larmes, elle se tint devant moi sur un nuage et me dit d’une voix faible :

« Lève-toi, Ossian, lève-toi et sauve mon fils ; sauve Oscar le prince des hommes ! Près du chêne du torrent de Lubar il combat contre les enfants de Lochlin. » Elle dit et se replongea dans son nuage. Je me couvre d’acier, ma lance souvent mes pas, mes armes retentissent. Je murmure, suivant ma coutume dans le danger, les chants des héros du passé. Comme un tonnerre lointain les enfants de Lochlin m’entendent. Ils fuient ; mon fils les poursuit.

Mais je le rappelai d’une voix semblable à celle d’un torrent éloigné. « Oscar, reviens sur Lena, m’écriai-je ; ne poursuis plus l’ennemi, quoique Ossian soit derrière toi. » Il revint et le bruit de ses armes fut doux à mon oreille. « Pourquoi, me dit-il, as-tu arrêté mon bras avant que la mort les eût tous enveloppés ? Sombres et terribles, sur les rives du torrent, ils ont attaqué ton fils et Fillan. Ils veillaient attentifs aux terreurs de la nuit. Nos épées en ont détruit plusieurs : mais tels que les vents de la nuit qui répandent l’Océan sur les sables blancs de Mora ; tels s’avancent les sombres enfants de Lochlin sur la bruyère de Lena. Les fantômes de la