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assauts de l’Océan contre le rivage du désert : aussi rugissantes, aussi vastes, aussi terribles, se mêlent les armées sur la plaine retentissante de Lena. Les gémissements des guerriers se répandent sur les collines, comme le tonnerre de la nuit lorsque la nue éclate au-dessus de Cona, et que mille fantômes ensemble poussent des cris aigus dans le vide des vents.

Fingal se précipite dans sa force, terrible comme l’esprit de Trenmor, lorsque dans un tourbillon il vient à Morven visiter les enfans de son orgueil : les chênes gémissent sur leurs montagnes et les rochers s’écroulent devant lui : à moitié vu dans les éclairs de la nuit, il marche à grands pas de colline en colline. Sanglante était la main de mon père, quand il faisait voler autour de lui l’éclat de son épée. Il se souvient des combats de sa jeunesse et son acier moissonne le champ de bataille.

Ryno s’avance comme une colonne de feu. Sombre est le front de Gaul. Fergus s’élance rapide comme le vent, Fillan, comme le brouillard de la colline. Ossian, comme un rocher, descend dans la mêlée. Je m’exaltais devant les hauts faits de mon père. Nombreuses furent les victimes de mon bras, lugubre la lueur de mon épée ! Mes cheveux alors n’étaient pas blanchis et ma main ne tremblait pas de vieillesse. Mes yeux n’étaient point voilés par les ténèbres, mes pieds, à la course, ne m’abandonnaient pas.

Qui peut raconter la mort des guerriers, les hauts faits des puissants héros, quand Fingal, brûlant dans son courroux, consumait les enfants de Lochlin ? Gémissements sur gémissements s’élevaient de collines en collines jusqu’à ce que la nuit eût tout enveloppé. Pâles, hagards, comme un troupeau de daims, les enfants de Lochlin s’assemblent sur la plaine de Lena. Nous nous assîmes pour écouter la harpe joyeuse, près du doux ruisseau de Lubar