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du héros. Il prend à la muraille le bouclier de Branno[1] et ses yeux se remplissent de larmes. Rouge était la joue du jeune guerrier, tremblante était sa voix. Il agite dans sa main la tête brillante de ma lance, et parle au roi de Morven : « Fingal ! roi des héros ! Ossian, le premier après lui dans la guerre, vous avez combattu dans votre jeunesse : vos noms sont célébrés dans les chants. Oscar ressemble au brouillard de Cona : je parais et m’évanouis. Le barde ne connaîtra pas mon nom ; le chasseur ne cherchera point ma tombe sur la bruyère ! Laissez-moi combattre, ô héros ! dans les guerres d’Inis-thona. Éloigné est le lieu du combat, vous n’entendrez point parler de la mort d’Oscar ! mais quelque barde m’y trouvera, quelque barde dans ses chants conservera mon nom. La fille de l’étranger verra ma tombe et pleurera sur le jeune guerrier qui est venu de si loin ; le barde dira dans les fétes : « Écoutez le chant d’Oscar, venu d’une terre lointaine ! »

« Oscar, fils de ma renommée, ta combattras ! répondit le roi de Morven ; qu’on prépare mon vaisseau au noir poitrail pour porter mon héros à Inis-thona. Fils de mon fils, souviens-toi de notre gloire ; tu es de la race des renommés ! Ne permets pas que les fils des étrangers disent : « Faibles sont les enfants de Morven ! » Sois, dans les combats, une tempête rugissante ; calme, dans la paix, comme le soleil couchant ! Dis au roi d’Inis-thona que Fingal se rappelle sa jeunesse, quand nous luttions ensemble aux jours d’Agandecca.

On leva les voiles bruyantes, les vents sifflèrent dans les courroies[2] des mâts. Les vagues fouet-

  1. Père d’Éverallin et grand-père d’Oscar.
  2. Les Celtes se servaient de courroies de cuir au lieu de cordes.