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çâmes les morts dans la terre. Nos pas étaient près de la baie de Runar. Avec un navire bondissant, s’avançait au loin une longue lame blanchissante. Noir était le chevaucheur des mers ; mais il portait un rayon de lumière, semblable à celui du soleil dans la flottante fumée du Stromlo. C’était la fille de Suran-dronlo, sauvage, avec des regards étincelants. Ses yeux étaient deux flammes errantes au milieu de ses cheveux en désordre. Son bras blanc portait une lance en avant ; l’on voyait se gonfler son sein, blanc comme les vagues écumantes qui se lèvent l’une après l’autre au milieu des rochers. Elles sont belles, mais terribles, et les matelots appellent les vents !

— « Venez, disait-elle, habitants de Loda ! Venez, Carchar, pâle au milieu des nues ! Slulthmor, qui marches dans des palais aériens ! Corchtur, terrible sur les vents ! Recevez les ennemis de Suran-dronlo, victimes de la lance de sa fille. Aux bords de ses torrents mugissants, ce n’était point une vaine ombre, une forme aux doux regards ! Quand il prenait sa lance, les oiseaux de proie agitaient leurs ailes bruyantes, car le sang était répandu sur les pas de Suran-dronlo. Il n’a pas allumé en moi la lumière de la vie, pour qu’elle brillât oisive sur ses torrents. J’ai brillé comme les météores et j’ai consumé les ennemis de Soran-dronlo ! »

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Sul-malla n’écouta point sans intérêt l’éloge du belliqueux Cathmor. Il était dans son âme, comme un feu caché dans la bruyère, qui s’éveille à la voix des vents et qui répand ses flammes au loin. La fille des rois se retira au milieu des chants, comme la voix d’une brise d’été, lorsqu’elle soulève la tête des fleurs et qu’elle ride les lacs et les ruisseaux. Son bruissement léger s’étend sur la vallée ; il est agréable et doux quoiqu’il attriste l’âme.