Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/144

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
88
LA GUERRE DE CAROS

nuage sur sa face, et que, sortant des ténèbres, il rayonne sur les vertes collines de Cona.

Oscar passa la nuit au milieu de ses pères : le matin blanchissant le trouva sur les rives du Carun. Une verdoyante vallée environnait une tombe qui fut élevée dans les temps passés. De petites collines levaient leurs têtes de distance en distance et penchaient à la brise leurs arbres séculaires. C’est là qu’étaient assis les guerriers de Caros, car ils avaient passé le torrent pendant la nuit. À la pâle lueur du jour on les eût pris pour des troncs de sapins desséchés. Oscar s’arrêta près de la tombe et trois fois il éleva sa voix terrible. Les tremblantes collines en retentissent alentour ; le cerf tressaille et bondit, et les ombres des morts s’enfuient effrayées, en poussant des cris sur leurs nuages. Tant la voix de mon fils fut terrible lorsqu’il appela ses amis !

Mille lances se hérissent à l’entour ; l’armée de Caros se lève. Pourquoi, fille de Toscar, pourquoi cette larme ? Mon fils est seul, mais il est brave ! Oscar est comme le feu du ciel ; il se tourne et l’ennemi tombe. Sa main, c’est le bras d’un fantôme, lorsqu’il l’étend du sein des nuages ; le reste de sa forme diaphane est invisible, mais les hommes meurent dans la vallée ! Mon fils voit s’approcher l’ennenii ; sombre, dans sa force, il s’arrête en silence. Suis-je seul, dit-il, au milieu de mille ennemis ? J’y vois plus d’une lance ! plus d’un œil aux sombres regards ! Fuirai-je vers l’Ardven ? Mais mes pères ont-ils jamais fui ? La trace de leur bras est dans mille batailles : comme eux Oscar sera renommé ! Venez, fantômes obscurs de mes pères, soyez témoins de mes exploits ! Je puis tomber ; mais je serai renommé comme la race de Morven. » Debout, il se recueille dans sa force, comme un torrent dans une étroite vallée. La bataille s’engage, les ennemis tombent : sanglante est l’épée d’Oscar !