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LA GUERRE DE CAROS

« Que fait Caros, le roi des vaisseaux ? » lui dit le fils du malheureux Ossian. « Déploie-t-il les ailes[1] de son orgueil, barde des temps passés ? — « Il les déploie, Oscar, répondit le barde, mais c’est derrière ces pierres amoncelées[2], Avec terreur il regarde par-dessus sa muraille. Il te voit terrible comme le fantôme de la nuit, qui roule les vagues contre ses vaisseaux !

« Va, toi le premier de mes bardes, reprit Oscar, prends la lance de Fingal ; attache sur la pointe une torche enflammée, agite-la à tous les vents du ciel ; et provoque-le par tes chants, à quitter le roulis de ses vagues et à s’avancer vers moi. Dis à Caros que je brûle de combattre ; que mon arc est fatigué des chasses de Cona. Dis-lui que les puissants ne sont point ici et que mon bras est jeune. »

Il partit en murmurant des chants. Oscar élève la voix ; elle arrive à ses guerriers sur l’Ardven, comme le bruit d’une caverne, quand la mer de Togorma roule devant elle et que ses arbres luttent avec les vents mugissants. Ils se rassemblent autour de mon fils, comme les torrents de la montagne, lorsqu’après la pluie, ils roulent dans l’orgueil de leur course. Ryno aborde le puissant Caros ; il frappe sa lance embrasée. « Viens combattre Oscar, ô toi qui t’assieds sur le roulis des vagues ! Fingal est loin d’ici : dans Morven il prête l’oreille aux chants des bardes ; le vent de sa demeure est dans sa chevelure. À ses côtés sont sa lance redoutable et son bouclier pareil à la lune obscurcie ! Viens combattre Oscar : le héros est seul !

Caros ne traversa point le torrent de Carun. Le barde retourne en chantant. L’obscurité de la nuit s’épaissit sur Crona. Le festin des coupes est préparé.

  1. L’aigle romaine.
  2. La muraille d’Agricola que réparait Carausius.