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OINA-MORUL

corbeau, errent sur la brise. Majestueux sont ses pas dans la douleur ! Des larmes sont dans ses yeux ! Son sein viril se gonfle sur son âme oppressée ! Retire-toi ! Je suis loin, bien loin de toi ! J’erre sur une terre inconnue. La race des rois m’entoure et cependant mon âme est triste ! Pourquoi nos pères ont-ils été ennemis, ô Ton-thormod, amour des jeunes filles ? »

« Douce voix de l’île des torrents, lui dis-je, pour quoi gémis-tu dans la nuit ? Les fils du courageux Trenmor ne sont point noirs dans l’âme. Tu n’erreras point sur des rives inconnues, ô Oina-morul aux yeux bleus ! Dans mon sein est une voix : elle n’arrive point à l’oreille des autres, mais elle ordonne à Ossian d’écouter les malheureux à l’heure de leur infortune.

Retire-toi, douce chanteuse de la nuit ! Ton-thormod ne gémira point sur son rocher !

Dès le matin je détachai les liens du chef et je le rendis à la vierge aux longs cheveux.

Mal-orchol, au milieu de ses salles, écouta mes paroles : « Roi de la sauvage Fuarfed, pourquoi Ton-thormod gémirait-il ? Il est de la race des héros, c’est une flamme dans la guerre. Vos aïeux étaient ennemis, mais leurs oudjres maintenant se réjouissent dans la mort. Elles étendent leurs mains de vapeur vers la même coupe dans Loda. Oubliez leur colère, ô guerriers ! Ce fut le nuage des années passées ! »

Telle fut la conduite d’Ossian lorsque sa chevelure était jeune encore : telle fut sa conduite, quoique la beauté d’une robe de rayons enveloppât la fille des îles !

Nous évoquons, vierge de Lutha, les années qui ont roulé loin de nous !


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