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CARTHON

pas trembler ma main ; je puis encore lever le glaive. Fuirai-je à la vue de Fingal, à la vue de celui que j’aime ? Fils de la mer, je n’ai jamais fui : lève ta lance acérée. »

Ils combattirent comme deux vents opposés qui luttent pour rouler les vagues. Carthon dit à sa lance de s’égarer, car il croit toujours que cet ennemi est l’époux de Moina. Il rompt en deux la lance brillante de Clessammor et se saisit de son épée ; mais, comme il attachait le chef, le chef tire la dague de ses pères : il voit découvert le flanc de Carthon, il y ouvre une large blessure.

Fingal vit Clessammor terrassé et s’avança dans le bruit de ses armes. À son aspect, l’armée s’arrête en silence et tourne les yeux vers le roi. Il vint comme le bruit sourd d’un orage avant le réveil des vents : le chasseur l’entend dans la vallée et se retire dans l’antre du rocher.

Carthon reste debout à sa place ; le sang ruisselle de son flanc. Il voit descendre le roi, ses espérances de gloire se réveillent ; mais pâle est sa joue : ses cheveux flottent en désordre, son casque tremble sur sa tête ; la force manque à Carthon, mais son âme demeure puissante.

Fingal voit le sang du héros ; il retient sa lance levée. — « Cède, roi des épées, dit le fils de Comhal, je vois ton sang. Tu as été redoutable dans le combat, et ta gloire ne s’évanouira jamais. »

« Es-tu ce roi si renommé au loin ? répondit Carthon ; es-tu cette lumière de mort qui épouvante les rois du monde ? Mais, pourquoi le demander ? Il est semblable au torrent de ses collines, impétueux comme une rivière dans sa course, rapide comme l’aigle du ciel. Oh ! que n’ai-je lutté contre le roi ! ma gloire eût été grande dans les chants, et le chasseur, en regardant ma tombe, eût pu dire : Il com-