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HENRI CORNÉLIS AGRIPPA

exceptionnels dont il avait été comblé par la cour de France... » Quelle palinodie La reine fut-elle ou non touchée de ses doléances ? Il ne paraît pas qu’elle lui soit venue en aide dans sa présente détresse. Nul doute que les moines, ses ennemis, n’aient encore indisposé à son égard la nouvelle gouvernante des Pays-Bas, comme ils l’avaient fait de Louise de Savoie, de Marguerite d’Autriche et des empereurs Ferdinand V le catholique[1] et Charles-Quint.

L’archevêque de Cologne, Hermann de Wiede, auquel Agrippa se recommande pour le soutenir dans sa récente querelle[2], n’ose pas y intervenir, bien qu’il soit un de ses plus dévoués protecteurs. Henri Cornélis en appelle à Érasme et ce rusé critique, avec une prudence mal dissimulée, lui conseille de se retirer de ces nouveaux embarras, s’il en est temps encore ; s’il est trop engagé dans la mêlée pour en sortir sans y laisser quelque chose de son honneur ou de sa réputation, de combattre alors de loin comme d’une tour, et de bien viser l’ennemi. Est-ce pour suivre ce conseil, est-ce par fatigue morale, par dégoût, qu’Agrippa semble soudain renoncer à la lutte ? Il part. On le retrouve peu de temps après avec le Prince-Archevêque aux eaux thermales de Wertrigies[3]. C’est la localité d’où est datée la dernière des Epistolæ familiares. Que devient-il ?


XVII

Obéissant sans doute à des sollicitations amicales ou peut-être à cette réelle sympathie qu’il avait depuis sa jeunesse éprouvée pour la France, où du reste il avait des parents, il a l’idée funeste de revenir à Lyon. C’était se jeter tête baissée dans la fournaise. Il est cependant vrai que le temps était loin où, par ses écrits mordants, par ses menaces, ses violentes satires contre la cour de Louise de Savoie, il s’était attiré de si tenaces rancunes ; jusqu’à un certain point il avait bien le droit de les croire apaisées, sinon complètement éteintes. Malheureusement pour l’infortuné philosophe, le souvenir en subsistait encore et, dès son arrivée à Lyon, il est appréhendé au corps et

  1. 1452-1516.
  2. La correspondance avec ce prélat se compose de 10 lettres des années 1531, 1532, 1533.
  3. Ou Bertrich.