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son esprit, il déguisait adroitement son humeur jalouse, triste, lascive, pleine d’insolence et de vanité; affectant la continence, la douceur, la clémence, tandis que, d’une autre part, il dissimulait la soif de gloire qui dévorait son âme. Trop prompt à provoquer comme à riposter par des mots sérieux, enjoués, mordants, il rendait vers pour vers, épigramme pour épigramme; on l’aurait cru réellement préparé d’avance contre tout. Les injures dont il accabla Sabina, son épouse, presque comme une vile esclave, la poussèrent au suicide. Du reste, elle répétait ouvertement qu’ayant reconnu par expérience toute l’atrocité du caractère d’Adrien, elle avait travaillé à ne pas devenir enceinte de ses œuvres pour la perte du genre humain. Vaincu par la violence d’une maladie sous-cutanée, qu’il avait supportée longtemps avec résignation, en proie à de cuisantes douleurs qu’il ne pouvait plus endurer, il fit périr plusieurs membres du sénat. Après avoir, par des présents secrets, obtenu la paix de plusieurs rois, il se vantait publiquement d’avoir fait plus de conquêtes par le repos que d’autres par les armes. Les charges publiques, celles du palais, les fonctions utilitaires furent soumises par Adrien à des formes nouvelles qui durent encore aujourd’hui, sauf les légers changements que Constantin leur a fait subir. Adrien vécut soixante-deux ans enfin, à ses derniers moments, qui furent déplorables, il souffrait dans presque tous les membres des tortures si truelles, que souvent il pria ses plus fidèles esclaves de lui ôter la vie; il s’offrait à leurs coups, et, pour qu’il ne se tuât pas lui-même, ses amis les plus chers le gardaient et veillaient à sa conservation.

XV. Antonin le Pieux.

Antonin Milvius, appelé aussi Bojonius, et depuis encore surnommé le Pieux, régna vingt-trois ans. Adopté