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à la fois. À cette époque, Vespasien saisit le principat en Orient : Vitellius, vaincu par les troupes de ce dernier, dans un combat livré sous les murs de Rome, est arraché du palais oit il s’était caché; on lui attache les mains derrière le dos, on le promène dans toute la ville pour le donner en spectacle à la multitude : et, afin d’empêcher cet homme si impudent de baisser, du moins au moment suprême, un visage que le remords de tant de crimes pouvait voiler de quelque rougeur, on lui met sous le menton la pointe d’un glaive; à moitié nu, la figure couverte de boue, de fange et d’autres ordures plus dégoûtantes encore, il est traîné aux échelles des Gémonies, où il avait laissé massacrer Sabinus, frère de Vespasien. Il y expire percé de mille coups, à l’âge de cinquante-sept ans. Tous ces empereurs, dont je viens de tracer la vie en abrégé, et principalement la famille des Césars, eurent l’esprit si bien cultivé par les lettres et par l’éloquence, que, sans l’énormité des vices de tout genre qui les déshonorèrent, à l’exception d’Auguste, ils eussent aisément pallié de faibles écarts.

IX. Flav. Vespasien.

Vespasien fut dix années empereur. Entre autres qualités, il eut surtout le mérite bien faire d’oublier les injures; à tel point qu’après avoir très richement doté la fille de Vitellius, son ennemi, il lui fit épouser un personnage des plus haut placés. Il supportait patiemment la mauvaise humeur de ses amis, et, comme il était très facétieux, il ne répondait à leurs boutades que par des plaisanteries. Ainsi, lorsque Licinius Mucianus, qui l’avait aidé à parvenir au pouvoir, montrait, par trop de confiance dans ses services, une insolente fierté, il rabaissait finement cet orgueil avec un mot qui leur était familier à tous deux, et se contentait de lui dire : «Tu sais que je suis un homme. » Mais quoi d’étonnant qu’il