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CANTON SUD-EST DE RENNES

bientôt une mare surmontée d’un lavoir en bois, aux trois quarts détruit. Cette flaque d’eau, couverte d’une épaisse couche de lentilles (que les savants appellent des Lemnacées), entourée d’arbres et de buissons, présente un joli paysage qu’un peintre de passage à Rennes, a su habilement reproduire.

Un jour que j’étais assis au bord de cette mare, regardant les rats d’eau courir dans les joncs, je fus interpellé de la manière suivante par une vieille femme qui filait sa quenouille en gardant sa vache :

− Vous aussi, vous l’avez vue et entendue, sans doute ?

− Qui cela, ma bonne femme ?

− La malheureuse qui, chaque nuit, vient ici laver son drap de lit.

− Non, ma foi, mais je serais heureux de connaître son histoire.

Alors la vieille se fit prier, car les paysans n’aiment pas à causer quand on les interroge. Mais je lui parlai d’elle, je la questionnai sur ses enfants, sur ses chagrins — nous en avons tous, hélas ! — et je revins sur l’histoire de la mare que je finis enfin par lui faire raconter.

− Elle n’est ni longue ni gaie, me dit-elle, ainsi que vous allez en juger.

Il y avait dans ma jeunesse au bourg de Chantepie, une vieille