reuse que par les choses qui lui font sentir son existence ; or le jeu nous met perpétuellement aux prises avec ces deux passions, et tient par conséquent notre ame dans une émotion qui est un des grands principes de bonheur qui soit en nous. Le plaisir que m’a fait le jeu a servi souvent à me consoler de n’être pas riche. Je me crois l’esprit assez bien fait pour qu’une fortune, médiocre pour un autre, suffise à me rendre heureuse, et dans ce cas le jeu me deviendroit insipide ; du moins je le craignois, et cette idée me persuadoit que je devois le plaisir du jeu à mon peu de fortune et servoit à m’en consoler.
Il est certain que les besoins physiques sont la source des plaisirs des sens, et je suis persuadée qu’il y a plus de plaisirs dans une fortune médiocre que dans une entière abondance. Une boîte, une porcelaine, un meuble nouveau, sont une vraie jouissance pour moi ; mais si j’avois trente boîtes, je serois peu sensible au plaisir d’avoir la trente-unième.