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prédicable, ainsi que nous l’avons dit. Et quoiqu’elle reçoive de l’ame elle-même le caractère d’universelle, elle n’est pas néanmoins en elle suivant son essence, mais suivant sa similitude et son espèce ; c’est ce qui fait dire au Philosophe : « Ce n’est pas la pierre qui est dans l’ame, mais l’espèce de la pierre » Or cette similitude ou espèce existant dans l’ame est numériquement une et singulière. Son universalité ne vient pas de ce qu’elle est dans l’ame, mais de ce qu’elle est comparée à plusieurs singuliers estimés tels. Leur jugement sur elle est le même, et il n’y a rien de déraisonnable en cela, parce que de même qu’une chose peut être genre et espèce sous divers rapports, de même aussi cette chose peut être universelle, particulière ou singulière pour des espèces diverses. Elle est effectivement singulière dans l’intellect seul, et elle est universelle en tant qu’elle a un caractère uniforme à l’égard de tous les individus qui sont hors de l’ame suivant qu’elle est également l’image de tous, amenant à leur connoissance, comme on peut le voir dans un exemple. En effet, s’il y avait une forme corporelle représentant plusieurs hommes, il est constant que cette forme, ou figure, ou espèce de statue aurait un être singulier propre suivant qu’il aurait l’être dans la matière ; mais elle aurait le caractère de communauté, en tant qu’elle serait commune par la représentation de plusieurs. Quoique l’on ait dit que cette nature, qui est universelle, est numériquement une, il n’est pourtant pas nécessaire qu’elle soit l’essence unique des espèces diverses dont elle est le genre, car le genre procède de l’indétermination ou indifférence, non pas néanmoins de telle sorte que ce qui est signifié par le genre soit numériquement une même espèce dans toutes les différentes espèces, à laquelle s’ajoutant une chose qui est la différence,