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car on ne pourrait pas concevoir que la matière exister sans la forme. Il faut remarquer à ce sujet qu’il peut arriver de deux manières que l’on conçoit une chose sans une autre; premièrement, dans la première opération de l’intellect dans laquelle l’intellect conçoit l’objet signifié du terme; secondement, dans la seconde opération de l’intellect dans laquelle il conçoit en composant ou en divisant par l’être et par le non être, comme lorsque je conçois que pierre est ou n’est pas blanc. Or, dans la première intellection je puis concevoir un corps sans figure, et tout sujet sans sa passion propre, car la figure n’est pas de l’essence du corps, puisque le corps est dans le genre de la quantité, et la figure dans le genre de la qualité; c’est pourquoi l’intellect peut concevoir un corps sans concevoir la figure. Il ne pourrait pas néanmoins concevoir un corps de cette manière sans concevoir le continu, parce que le continu est de l’essence du corps. Mais dans la seconde opération de l’intellect je ne puis pas concevoir qu’un corps soit sans figure, parce qu’un corps ne peut jamais être sans figure, ni un sujet sans sa passion propre, comme il a été dit. Or, le sujet n’a pas une pareille dépendance de l’accident commun; car il ne suit pas nécessairement le sujet comme la figure suit les principes essentiels du corps, car s’il est corps il a nécessairement une position des parties dans le tout, comme on le dira plus loin, parce que la position est la différence de la quantité. Or, celle-ci entraîne nécessairement la figure, ce qui n’arrive pas à l’égard de l’accident commun, par rapport à son objet. Donc le sujet peut être conçu sans concevoir l’accident commun, et il peut être conçu existant sans concevoir l’accident commun. Mais il ne peut pas être conçu existant sans l’accident propre, puisqu’il ne peut exister sans l’accident propre, car si on enlève la figure il n’y a plus de situation de parties, et par conséquent plus de corps; donc, il ne