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le soleil, il faudra entendre qu’elle est devenue lumineuse par le soleil. Et comme tout ce qui est créé est créé par un contingent, c’est-à-dire par celui à qui il n’arrive point d’être avec ce qui est créé on devra dire, qu’elle est devenue lumineuse par l’effet d’un objet obscur et ténébreux, non en ce sens qu’elle a toujours été lumineuse ou obscure, mais qu’elle serait telle si elle était abandonnée à elle seule. On en trouve un exemple plus exact dans les planètes et les corps célestes, qui sont toujours éclairés par le soleil. Ainsi donc est-il évident qu’il ne répugne point à la raison de dire qu’un être a été créé de Dieu et qu’il a cependant toujours été.

(11) Il est étonnant que saint Augustin n’eût point découvert cette absurdité, si elle eût existé, car c’eût été un puissant argument pour réfuter l’éternité du monde, qu’il avait combattue par une foule de raisonnements dans les onzième et douzième livres de la Cité de Dieu. D’où vient donc qu’il n’en dit pas un mot? Bien mieux, il semble insinuer qu’il n’y a aucune absurdité, puisqu’il dit dans le dixième livre de la Cité de Dieu, chapitre XXXI, en parlant des Platoniciens: "Qu’ils l’entendent de quelque façon qu’il leur plaira, ils trouveront que ce n’est point un commencement de temps, mais de substitution." Car, comme ils disent, la trace d’un pied qui aurait posé de toute éternité sur le sable serait éternelle, comme le pied qui aurait fait l’empreinte, bien qu’on sache qu’elle a été faite par lui; et cependant l’un n’est pas antérieur à l’autre, malgré que l’un ait fait l’autre. Or, disent-ils, le monde et les dieux qui ont été créés dans le monde ont toujours été, celui qui les a créés a existé de toute éternité, et cependant ils ont été créés. Et il n’a jamais dit que ces paroles contenaient une absurdité. Mais il procède contre eux d’une autre façon. Dans le quatrième chapitre du onzième livre, il dit encore: "Ceux (12)