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chirurgie ou à la médecine, les hommes livrés à l’étude de toutes les autres sciences et de tous les arts, les naturalistes, les philosophes, les littérateurs même ne peuvent qu’en tirer un très grand fruit.

L’auteur, après avoir montré que les sciences restent longtemps enveloppées d’obscurité, que les traits de lumière que quelques grands hommes jettent sur elles par intervalle ne suffisent pas pour leur gloire ; que leur progrès sont lents ; que leur perfection paraît fuir loin d’elles à mesure qu’elles s’en avancent de plus près, donne les règles principales qu’il faut mettre en pratique, si l’on veut se rendre habile dans l’art de guérir.

L’observation et l’expérience sont, selon Quesnay, les deux sources d’où découlent les vérités qui peuvent enrichir cet art. Par l’observation on suit la nature dans sa marche obscure, on l’examine attentivement ; par l’expérience on l’interroge, on lui arrache ses secrets. L’observation et l’expérience doivent se tenir étroitement liées et se prêter leurs se cours réciproques. La première, abandonnée à ses seules forces, peut jeter dans l’erreur ; elle est incertaine. L’intérêt, le préjugé, la manière particulière d’apercevoir, sont souvent des écueils contre lesquels la vérité vient faire naufrage. La seconde, sans le secours de l’observation peut de même égarer ; il faut la ramener au témoignage de la raison. C’est sur l’accord mutuel de l’une et de l’autre que la science de la nature imprime son sceau. Sans théorie, il n’y a ni science ni art ; Quesnay définit avec justesse celle de la chirurgie, la pratique réduite en préceptes. Il rejette hors d’elle les applications arbitraires, les opinions dictées par la seule imagination, les simples vraisemblances, les pures possibilités. Les connaissances appuyées sur les causes de nos maux, sur l’observation de leur signe, sur les lois de l’économie animale, sur l’opération des remèdes, sur la physique et sur la nature, composent la théorie de l’art de guérir. Tout ce que notre auteur en dit est vrai, judicieux, sage, méthodique, bien suivi, bien enchaîné, et peut s’appliquer à une infinité d’autres sciences.

Mais quoique la théorie de la chirurgie soit lumineuse et profonde ; cependant les préceptes dont elle est formée sont circonscrits dans des limites étroites. Là où s’éteint le flambeau de la certitude, on n’a d’autres guides pour se conduire que la conjecture et l’analogie. Dans les travaux de l’esprit, elles contribuent souvent à la découverte de la vérité ; mais ce n’est qu’à des hommes savants, à des génies, qu’il appartient d’en faire usage, encore cet