Page:Oncken - Œuvres économiques et philosophiques de F. Quesnay.djvu/72

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vile et corrompue pouvaient être sûrs, de quelque qualité qu’ils fussent, d’être traités comme ils le méritaient.

La quantité de connaissances en tout genre qu’il avait amassée était immense et paraît incroyable, si on remarque le peu de temps qu’une vie toujours très active lui avait laissé, mais il savait en mettre à profit jusqu’aux moindres instants ; une heureuse mémoire et une tête excellente lui donnaient le moyen de rejoindre si parfaitement ces morceaux détachés, qu’ils formaient chez lui un tout continu ; il eût presque trouvé les éléments d’une science dans un dictionnaire, Cette érudition au reste n’était chez lui qu’en dépôt pour le besoin ; elle ne lui servait qu’à être toujours au pair de la conversation ; toutes les sciences et tous les arts lui étaient familiers ; il était bien éloigné de se servir de tout ce savoir pour s’épargner des recherches ; les opinions des plus grands hommes ne devenaient pour lui des autorités qu’après qu’il les avait soumises à l’examen et à l’expérience ; et en ce sens, on peut dire que les idées mêmes qu’il avait empruntées des autres étaient à lui, et que ses ouvrages étaient absolument neufs. Toutes ces qualités étaient couronnées chez lui par une simplicité naïve, qui rendait son commerce extrêmement agréable, même dans la société domestique où on le trouvait toujours égal et où la sérénité de son âme se peignait jusque dans ses moindres actions.

Quoiqu’il fût depuis longtemps à la cour et qu’il y jouît d’un crédit considérable, il n’a jamais eu même la pensée de l’employer pour lui ni pour les siens, et s’il en a quelquefois fait usage, ce n’a jamais été qu’en faveur de ceux qu’il croyait pouvoir mettre en état de servir le public ; la nation française était sa famille, et il se croyait débiteur de quiconque la pouvait servir ; en un mot, on peut dire que si l’enthousiasme du patriotisme, une très longue carrière et les talents les i)lus précieux, employés sans relâche et dans toute leur étendue au bien de la société, donnent quelque droit à la reconnaissance des hommes, personne n’y en a jamais eu plus que M. Quesnay. Il n’a laissé de son mariage qu’un fils et une fille ; cette dernière avait été mariée à M. Hévin, premier chirurgien de Madame, auquel en mourant elle a laissé quatre enfants. La place d’associé libre qu’occupait M. Quesnay dans cette Académie a été remplie par M. Menard de Chousy, conseiller d’état, contrôleur général de la maison du roi, chevalier des ordres royaux, militaires et hospitaliers de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem, déjà surnuméraire dans cette classe.