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ATHÈNES AU XVIIe SIÈCLE

tation dans le monde pour n’en pas rechercher par une petite dissertation de deux fueilles, il ne veut pas se commettre avec un homme tel que M. Guillet. Pour moy, qui n’ay aucune réputation à ménager, j’ay cru estre obligé d’escrire, et sans me déguiser, pour servir de commentaire à ma première relation et pour justifier ma sincérité, quoy que quelques uns de vos Messieurs de Paris, que j’honore d’ailleurs beaucoup, me conseillassent de ne point faire de response. Au fond, quand je n’aurois fait que détromper une partie des curieux, qui prenoient M. Guillet, ou La Guilletiere, pour un véritable voyageur, et non pas pour un homme qui escrit sur des mémoires mandiés, je n’auray pas perdu ma peine, et ils auront du moins sujet de se tenir sur leurs gardes, en cas que M. Guillet produise quelque nouveau roman de la Grèce. Je prie Dieu qu’il le convertisse, afin qu’il n’abuse plus du talent qu’il a de bien escrire et de la crédulité d’une infinité de lecteurs qui se persuadent aisément ce qui leur donne du plaisir à lire aux despens de la vérité[1].

  1. L’abbé Claude Nicaise, de Dijon (1623-1701), toujours à l’affût des nouvelles littéraires, n’avait pas manqué de se mêler à la querelle de Guillet et de Spon, à qui il écrivait, de Dijon, le 24 janvier 1619 :

    « J’ay une joye, Monsieur, que je ne vous sçaurois exprimer d’apprendre par vous mesme que vous vous portez mieux. Je vous aurois envoyé le misérable livre de La Guilletière, si je n’avois veu que vous l’aviez desjà. Je n’ay point voulû achepter un livre de cette nature et j’ay mandé à de mes amis de Paris de ne le point envoyer, qui en avoient quelque dessein. Ce sont de misérables gens que ces Guilletières de faire de si méchants livres et qui mériteroient qu’on les desguelletà et qu’on leur donnasse les estriviéres, de donner au public de ces sortes de livres. C’estoit le sentiment de M. de La Mare et de M. de Chevanes, nos bons amis, qui vous estiment infiniment, qu’on traittast ainsy l’autheur d’Athènes ancienne et nouvelle, lorsqu’ils eurent vû son livre. Pour moy j’admiray l’effronterie de cet autheur de nous promettre tous les plans ou veues des plus belles villes de la Grèce et d’avoir commencé si impertinément par Athènes et Lacédémone. Ils se contentèrent de représenter en ceste dernière deux Capucins sur un chemin, d’un costé, et de l’autre quelques mazures, et n’en font guère davantage dans la première, et ils appellent cela de véritables plans de ces villes. Et, lorsqu’on leur faict connoistre d’une manière honneste et civile que ce ne sont pas là des plans dessignéz au juste, ils s’emportent jusques à dire les dernières injures au monde et font des satyres contre les honnestes gens, qu’ils ne justifient pas mieux que leurs plans ridicules, car ils produisent deux Capucins et leurs lettres mendiées qui sont de misérables argumens.

    « Il n’y a point de braves gens qui ne soient indignés contre les Guilletière…