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H. OMONT

l’aga, qui est gouverneur du chasteau, pour lui dire que l’aumônier de M. l’Ambassadeur de France étant sur le point de partir pour aller joindre à l’ambassadeur que Sa Hautesse envoioit en France et qui devoit l’y accompagner, désiroit de voir quelque chose dans le chasteau, c’est pourquoi M. le consul l’en prioit de ne lui pas refuser cette grâce. Cet aga, [qui] se trouvoit pour lors chez le bacha, qui est gouverneur de la ville, dit au truchement : « Celui pour qui vous demandez cette grâce est aparamment cet espion dont je suis en peine et qu’on m’a dit avoir été déjà autour du chasteau pour en observer le fort et le foible. » « Seigneur, répondit le truchement, « quiconque vous a dit que c’est un espion n’a pas dit la vérité et vous pouvez vous en assurer par les ordres qu’il vient de recevoir d’aller accompagner en France un ambassadeur. » « Hé bien, répondit l’aga, puisqu’il est tel que vous dites, qu’il vienne demain au château et je l’y recevrai avec honneur, car je ne puis l’y recevoir aujourd’hui, étant en affaire avec le bacha. » Et aïant appris du truchement que je devois partir le lendemain pour Napoly, il tira de son poulce un gros anneau d’yvoire, qui leur sert pour bander l’arc et qu’ils portent pour ornement, il dit : « Portez-lui cet anneau et dites lui qu’il peut aller avec 6 personnes au château, dont on lui donnera l’entrée en rendant cet anneau, suivant l’ordre que je vais y envoier. » J’allai aussitost au chasteau avec notre compagnon, le capitaine, qui étoit déjà de retour, et trois autres qui me prièrent de les y faire entrer avec moi et avec le truchement, qui, arrivant à la porte, présenta l’anneau de l’aga et aussitost on nous fit entrer par le guichet ; mais on arresta un septième qui s’étoit glissé avec nous, les gardes déclarant qu’ils avoient seulement ordre d’en faire entrer 6 avec moi, néanmoins on les pria tant, qu’ils laissèrent encore entrer ce septième.

« Aussitost que nous fûmes entréz, j’allai satisfaire l’ardent désir que j’avois de voir ce fameux temple, dont on parle tant, et je connus que mon désir étoit juste et raisonnable ; car, bien