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Dans ses critiques, ce qu’il attaque le plus, ce n’est pas l’auteur ou l’artiste, c’est la démocratie même, qu’il a en horreur et qu’il accable de son mépris. Comme preuve, je citerai le jugement qu’il porte, dans un de ses articles, sur une femme, Mme Bordas, qui a eu le malheur de lui déplaire. Je ne connais pas cette dame-là, mais je ne crois pas qu’elle ait pu mériter cette kyrielle d’injures, et je soupçonne plutôt qu’elle paye pour la démocratie, que l’auteur prend plaisir à fustiger sur ses épaules.

« L’histoire d’aujourd’hui, — qui ne sera peut-être pas celle de demain non plus, — c’est Mme Bordas ! la fameuse Mme Bordas ! le champignon poussé tout à coup, en un soir, dans ce fumier des cafés chantants, où viennent de pareilles denrées ! Mme Bordas est presque, en ce moment, un événement politique… Les parias sont nés, disent les Indiens, des pieds divins de Brahma. Mme Bordas, qui joue la paria sociale, est née des pieds odorants de ces réunions politiques où suaient Budaille et Peyrouton. Elle chante comme ils parlaient. Quelle gaillarde ! sans calembour. Je l’ai vue dimanche au Châtelet, cette curiosité nouvelle… Après ces deux adorables artistes anglais, qui chantent si moelleusement à l’œil, avec leur corps tout entier, des poésies physiques si charmantes, je l’ai entendue, elle, la femme du cri et de l’effort et du pointu en toute chose… car Mme Bordas, c’est un ensemble d’angles, de triangles et de rectangles, — tout un système de géométrie convulsive…

« Ah ! ce n’est pas la forte femme aux puissantes mamelles de feu Barbier. (Feu, puisqu’il est à l’Académie !) Des mamelles, elle en a comme l’Envie dans les tableaux