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pour leurs épouses : les maladroits ! ne feraient-ils pas mieux de se méfier de l’ennui !

C’est l’ennui qui porte les femmes à lire vos romans, messieurs !

Et voici l’esprit de vos ouvrages et de vos œuvres théâtrales.

Prouver que le bonheur n’est possible que dans l’amour illégitime, excuser l’adultère, l’entourer de joies et de félicités, rendre le mari odieux ou ridicule et faire de l’amant un séducteur irrésistible.

Cette littérature peut avoir un grand mérite artistique, mais elle offre les plus grands dangers.

L’imagination d’une femme délaissée se crée bien vite un idéal… et il lui faut une bien grande énergie pour ne pas succomber. Croyez-vous que si, dans une situation semblable, une femme pouvait trouver une distraction dans l’étude, dans l’art, dans les sciences, voire même dans l’ambition, l’honneur des familles n’y gagnerait pas quelque chose ? Que de douleurs seraient épargnées, que de déceptions évitées !!!

L’esprit ne tue pas le cœur, mais il le tempère et le domine.

La femme actuellement ne vit que par le cœur, qu’y a-t-il d’étonnant s’il l’entraîne parfois !

Je crois qu’il est bien moins dangereux pour une femme d’écrire un roman, fût-il même mal écrit, que de le faire en action.