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Dans ce moment, malgré tous les préjugés contraires, l’esprit féminin se réveille, la femme commence à comprendre l’insuffisance de son éducation, elle désire en sortir, ayant dans sa nature, plus que l’homme encore, l’instinct de ce qui est élevé. Elle réagit contre l’abaissement de son niveau intellectuel, et aspire à sa part d’influence. Quelques-unes prennent la plume et s’adonnent aux belles-lettres, elles sentent que le génie est en elles ; mais au lieu d’être guidées et conseillées, elles ne trouvent que railleries et persifflage. J’affirme cependant que si les hommes étaient sages, s’ils avaient réellement en eux cette supériorité dont ils se vantent, au lieu de se servir de l’arme usée du ridicule, ils aideraient loyalement le sexe faible à s’affranchir des liens qu’ils font peser sur lui, ils proclameraient eux-mêmes l’égalité de l’âme humaine et mettraient leur savoir au service de la femme, avec bonne foi et courtoisie : ce qui, en émancipant la femme, la rendrait digne de cette émancipation.

Vouloir étouffer le réveil des idées, les aspirations vers la liberté, qui agitent les femmes dans tous les pays du monde, est une illusion et une imprudence. Toute race asservie qui comprend qu’elle est esclave, du moment où elle peut discuter ses droits, est à moitié libre : et il ne sert à rien de lui marchander son émancipation totale, car l’esclavage n’est basé que sur l’ignorance des classes asservies.

Mieux vaudrait donc suivre le courant que le contrarier, surtout quand la rénovation sociale est au bout.

Comment les hommes ne comprennent-ils pas que le