Page:Olympe Audouard Conference M Barbey-d'Aurévilly 1870.djvu/11

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 12 —

cœurs épris prêts au sacrifice ; ce sont d’adorables jeunes filles, d’adorables femmes mariées, mais la chrétienne dans le sens rigoureux, et, disons le mot, à scandale, la dévote, la pieuse, la sainte enfin n’y est pas… Parmi les patriciennes de l’amour humain, la patricienne de l’amour divin, la dévote qui ne céderait pas à Valmont, mais qui au contraire le convertirait. »

La dévote qui convertirait, voilà l’âme qui parle en M. Barbey-d’Aurévilly. Mais je gage que son imagination dirait… « convertir une dévote de l’amour divin à l’amour humain serait cependant d’une bien plus douce volupté. »

Les contradictions produites dans l’esprit de M. Barbey-d’Aurévilly par ces deux courants d’opinion font des ouvrages de cet écrivain un mélange de sacré et de profane, d’amour divin et de matérialisme, qui ne manque pas d’un certain piquant, mais qui, s’il faut en croire le curé de ma paroisse, est d’une morale fort peu orthodoxe.

Tranchons le mot : M. Barbey-d’Aurévilly est franchement rétrograde, il tient au moyen âge par ses idées politiques et religieuses ; je regrette seulement qu’il n’ait pas envers les femmes l’aimable courtoisie qui caractérisait les hommes de cette époque. En ce temps-là, il y avait aussi des bas-bleus… et personne ne trouvait mauvais que les belles-lettres fussent du domaine féminin. Les femmes tenaient cour d’amour et de gaie science ; c’est à elles qu’on soumettait les différends où l’honneur et la poésie étaient en jeu, et leur jugement était sans appel. Leur influence exerça sur les mœurs un effet salutaire, et c’est à elles que nous devons cette galanterie et cette délica-