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IX

Cette question de la polyandrie et une confidence par insinuation sur la position délicate où a pu se trouver un instant M. de Ujfalvy vis-à-vis d’une femme qui lui continuait avec insistance l’offre de ses bons offices, ont provoqué sous la rubrique de Prostituées et Prostitution une série de questions auxquelles je vais tâcher de donner satisfaction.

Si nous entendons ici par prostitution l’œuvre courante, active et débraillée qui, par spéculation, de luxure d’abord, de paresse et de lucre plus tard, fait passer la femme par tous les degrés de l’impudicité et la jette enfin dans l’abjection ; je peux hardiment répondre qu’en Asie comme en Europe la prostitution est et a toujours été une honteuse infirmité qui se dérobe au grand jour et n’existe, quant à son personnel, qu’à l’état d’infime exception.

Dans l’antiquité et en tous les temps la prostitution a été sévèrement condamnée en Asie.

Les lois de Manou[1] et le code des Gentoux[2] font des adultères et des courtisanes une même classe de femmes abjectes et dégradées dont le contact est impur et criminel.

Le Deutéronome chasse d’Israël la femme qui se prostitue et punit de mort l’adultère et le viol[3].

Dans les temps modernes la prostitution reste, dans toute l’Asie, l’objet de la sévérité des lois et du mépris de la société.

À Ispahan, les prostituées sont confinées dans un quartier excentrique qui leur est spécial. C’est le quartier des femmes découvertes, des dévoilées[4].

Au pays des Birmans, à Rangoun, ou plutôt près de Rangoun, sur la rive occidentale de la rivière de Syriam et dans

  1. Lois de Manou, liv. XI, stances 58, 66, 169 et suiv.
  2. Code de lois des Gentoux, chap. xix, sect. i à viii.
  3. Deutéronome, chap. xxii, versets 20 et suiv., et chap. xxiii, verset 17.
  4. Chardin, Voyage en Perse, t. Ier, p. 228, édit. d’Amsterdam, 1785.