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puis, par l’Oxus, elles atteignaient le pays des Massagètes[1].

Rompus au rude métier de convoyeurs, initiés à tous les détails d’une route longue, lente et difficile, les Massagètes se chargeaient alors du transport en caravanes des marchandises[2] à porter aux frontières de la Chine, chez les Issedons[3], où, dans ces temps reculés, étaient établis des marchés d’échanges.

Un pareil voyage était l’occasion d’une longue absence et c’était toujours une périlleuse campagne[4].

La route à suivre se mesurait par près de 1200 lieues à travers des contrées inhospitalières par le froid, la solitude, les animaux féroces et les hommes larrons[5].

Chaque voyage exigeait des années et demandait à une population clairsemée[6] des hommes par milliers pour servir et conduire les bêtes de charge, pour protéger et défendre au besoin les caravanes et pour garder les défilés, dont la possession a toujours excité la convoitise des Chinois[7].

Et puisque les maris s’absentaient pour longtemps, ce dut être pour s’assurer la possession d’un mari que les femmes massagètes en prirent plusieurs[8].

  1. Les Massagètes ont un instant occupé le bas Oxus. Cette route ayant été plus tard barrée par la guerre des Parthes, le commerce prit alors la voie de Palmyre, à qui le transit a fait la fortune si belle que sa splendeur a affirmée.
  2. Ils montent, dit Ma-touan-lin, sur des chars à quatre roues, traînés par quatre, six ou huit bœufs, selon la grandeur des chars (Abel Rémusat, Nouveaux Mélanges asiatiques, t. Ier, p. 221).
  3. Issedons, c’est la nation qui dans les historiens chinois est nommée Kao-Tché, ce qui signifie : les Hauts Chariots (D’Anville, Recherches sur la Sérique des anciens, p. 225).
  4. Voir Reinaud, Relations politiques et commerciales de l’empire romain avec l’Asie orientale, passim.
  5. Ils avaient à passer les défilés qui précèdent le plateau de Pamir, à traverser ce dangereux plateau, puis le Chamo.
  6. Les auteurs chinois n’estiment qu’à 100 000 le nombre des familles Youei-tchi.
  7. Les Chinois en ont été deux fois les maîtres : une première fois vers la fin du premier siècle de notre ère, une seconde fois vers la moitié du septième siècle. Ils en ont toujours été facilement dépossédés.
  8. La rareté des hommes semblerait appeler la polygamie et non la polyandrie. Cependant c’est bien polyandrie qu’il convient de dire ici. La