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Nous connaissons tous l’étendue du vaste empire de Cyrus le Grand Vainqueur des peuples qui confinaient à la rive méridionale de l’Oxus, il avait porté ses armes au-delà de ce fleuve et, toujours vainqueur, il avait fondé Cyropolis sur le Jaxarte.

Bientôt une guerre de voisinage éclate, et dans cette guerre, où il périt, c’est aux Massagètes que Gyrus se trouve avoir affaire.

Le territoire des Massagètes, qui, comme nous l’avons vu, avoisine le Kachmir et le Tibet, avoisine donc aussi l’Oxus et le Jaxarte, et, particularité dont nous devons prendre note, ces Massagètes sont les Amazones des classiques grecs et latins, leur pays est gouverné par les femmes, et au temps de Cyrus, nous le savons assez, c’est la reine Tomyris qui le gouverne.

Douze siècles plus tard, c’est-à-dire vers 650 de notre ère, le gouvernement féminin des Massagètes existait encore.

L’histoire des rois du Kachmir, la Radjatarangini, nous fait savoir, en effet, que Lalitâditya, le roi du Kachmir alors régnant, eut vers la fin de son règne à faire la guerre à un peuple voisin de ses États, peuple gouverné par des femmes.Lalitâditya fut vaincu et le poète Kalhana a soin de faire comprendre que ce fut, non point par les armes, mais bien plutôt par les charmes que déploya l’armée de femmes[1] qui lui fut opposée.

Ce peuple voisin du Kachmir et gouverné par les femmes n’est, nous l’avons vu, et ne peut être que les Massagètes.

Par le fait de cette dernière constatation, à l’est comme à l’ouest et même au midi, la position territoriale des Massagètes s’affirme donc plus énergiquement telle qu’elle a été précédemment indiquée.

Les écrivains chinois contemporains du roi Lalitâditya,

  1. Voici le singulier euphémisme qu’emploie Kalhana pour dissimuler la défaite de Lalitâditya :

    « Il fut cause que les femmes des ennemis offrirent, de leurs mains jointes, les dons funèbres à leurs parents morts, inondant de larmes leurs visages qui étaient embellis par des joyaux et des signes coloriés. » (Radjatarangini, liv. II, stance 130.)