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qui serions le vent ; nous séjournerions au milieu de l’air avec le vieillard du Hoang-Ho, qui vivait entre le ciel et la terre à cause qu’il n’était sujet ni de l’un ni de l’autre. Dans l’apologie grotesque elle-même du Taoïsme qu’offre la Chine actuelle, nous trouverions une mine de traits comiques dont aucune religion ne possède l’équivalent.

Mais c’est dans le domaine de l’esthétique que l’action du Taoïsme sur la vie asiatique a été la plus forte. Les historiens chinois ont toujours considéré le Taoïsme comme « l’art d’être au monde », car il a trait au présent, c’est-à-dire à nous-mêmes. C’est en nous que Dieu se rencontre avec la Nature et que hier est distinct de demain. Le Présent est l’Infini en mouvement, la sphère légitime du Relatif. La Relativité cherche l’Adaptation ; l’Adaptation, c’est l’Art. L’art de la vie consiste en une réadaptation constante au milieu. Le taoïste accepte le monde tel qu’il est et, contrairement aux confucianistes et aux bouddhistes, s’efforce de trouver de la beauté dans notre monde de malheur et de