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plir quelque chose de possible dans cette chose impossible que nous savons être la vie.

La philosophie du thé n’est pas une simple esthétique dans l’acception ordinaire du terme, car elle nous aide à exprimer, conjointement avec l’éthique et avec la religion, notre conception intégrale de l’homme et de la nature. C’est une hygiène, car elle oblige à la propreté ; c’est une économie, car elle démontre que le bien-être réside beaucoup plus dans la simplicité que dans la complexité et la dépense ; c’est une géométrie morale, car elle définit le sens de notre proportion par rapport à l’univers. Elle représente enfin le véritable esprit démocratique de l’Extrême-Orient en ce qu’elle fait de tous ses adeptes des aristocrates du goût.

Le fait que le Japon s’est trouvé si longtemps isolé du reste du monde a aidé puissamment, en développant le goût de la vie intérieure, à propager le théisme. Nos maisons et nos habitudes, notre façon de nous vêtir et notre cuisine, notre céramique, notre laque, notre peinture, notre littérature même, tout, chez nous, a subi son influence. Per-