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Les histoires de fleurs n’ont jamais de fin. En voici encore une. Au seizième siècle, la « gloire du matin» était encore assez rare chez nous. Rikiu en possédait un jardin entièrement planté, et qu’il cultivait avec un soin assidu. La renommée de ses convolvulus parvint aux oreilles du Taïko et celui-ci exprima le désir de les voir. Rikiu l’invita donc à un thé matinal chez lui. Au jour fixé, le Taïko vint et se promena à travers le jardin ; mais il n’y avait aucune trace de convolvulus. Le sol avait été nivelé, puis couvert de fins cailloux et de sable. Plein d’un sombre courroux, le despote entra dans la Chambre de thé ; mais un spectacle inattendu le réjouit. Sur le tokonoma, dans un bronze précieux de l’époque des Song, il aperçut une seule « gloire du matin », la reine du jardin tout entier !

De tels exemples nous montrent toute la signification du sacrifice des fleurs. Cette signification, il se pourrait que les fleurs elles-mêmes l’apprécient. Elles ne sont point lâches, comme le sont les hommes. Certaines fleurs se font gloire de la mort : les fleurs du