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pour établir la domination de l’esprit sur la matière, ne considéra la maison que comme le refuge temporaire du corps. Le corps lui-même n’était plus qu’une hutte dans une solitude, un léger abri fait avec les herbes qui poussaient aux alentours et qui, sitôt qu’elles n’étaient plus liées ensemble, se dissolvaient dans le néant originel. Ainsi, dans la Chambre de thé, la fugacité des choses se trouve suggérée par le toit de chaume, leur fragilité par les piliers grêles, leur légèreté par les poteaux de bambou, leur apparente insouciance par l’emploi de matériaux ordinaires. Quant à l’éternité, elle réside uniquement dans l’esprit qui, en s’incarnant dans ces simples choses, les embellit de la subtile lumière de son raffinement.

Que la Chambre de thé soit bâtie pour s’adapter à un goût individuel est une application singulièrement puissante du principe de la vitalité dans l’art. L’art, pour avoir tout son prix, doit être en conformité avec la vie contemporaine. Certes, il ne s’agit point d’ignorer les droits de la postérité, mais nous devons chercher à jouir le plus possible du