Page:Ohnet - L’Âme de Pierre, Ollendorff, 1890.djvu/69

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Oui, c’est un aimable compagnon et sa science est réelle, malgré les allures sataniques qu’il prend volontiers. Je ne le crois, du reste, pas aussi diable qu’il tient à le paraître. Mais il est incontestable que, depuis qu’il s’occupe de moi, je vais mieux….

— Oh, Dieu ! cher enfant, s’écria Mme de Vignes, rien que pour cela il me paraîtrait divin. Qu’il soit ce qu’il voudra, pourvu qu’il te guérisse. C’est, en tous cas, un homme parfaitement élevé et du meilleur ton…. Mais il pourrait être rustre que je l’adorerais. Je ne lui demande que de te rendre la santé….

— Il doit venir, ce matin, constater si ma petite débauche d’hier soir ne m’a pas été funeste…Ce sera, malheureusement, une des dernières visites qu’il nous fera : il part, ces jours ci, pour l’Orient, avec son ami et client le comte Woreseff….

— Ce Russe à qui appartient le yacht, ancré dans la rade de Villefranche ?

— Ce Russe même.

— Était-il des vôtres hier soir ?

— Non ! Il ne quitte presque jamais son bord…. On dit qu’il y garde, avec un soin jaloux, une Circassienne qu’il a enlevée et qui passe pour la beauté la plus accomplie qui se puisse rêver. Son appartement est aménagé avec un luxe oriental fabuleux. Le service y est fait par des femmes vêtues de somptueux costumes. Le soir, en passant en barque le long du navire, on entend des harmonies exquises. Ce sont des musiciens engagés à bord pour distraire le comte et sa belle. Voilà avec qui Davidoff s’embarque pour le pays des Mille et une Nuits.

— Je ne le plains pas, dit gaiement Mme de Vignes.

— Il a renouvelé hier soir auprès de Pierre les instances les plus vives pour le décidera l’accompagner. Woreseff, qui adore