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— Un douanier.

Ils attendirent. L’homme montait. Arrivé de plain-pied, il observa les deux promeneurs avec méfiance. Le lieu était désert, quoiqu’on fût seulement à deux kilomètres des dernières habitations ; mais toute la côte est sauvage et propice aux entreprises des fraudeurs.

— Nous prenez-vous pour des contrebandiers ? demanda le peintre.

— Non, monsieur, dit le soldat, maintenant que je vous vois de près ; mais d’en has, en vous apercevant plantés immobiles, j’ai cru que vous veniez donner quelque signal.

— Est-ce qu’il y a des délinquants en campagne ?

— Oh ! toujours ! C’est entre Monaco et Vintimille que la fraude se fait le plus ordinairement. Il n’y a pas de semaines où il ne s’opère quelque descente. Et, depuis quatre jours, nous surveillons une barque qui croise, guettant l’occasion. Mais les coquins nous paieront les nuits blanches qu’ils nous font passer, et, s’ils s’acharnent, ils seront reçus à coups de fusil… Bonsoir, messieurs… Ne restez pas là… l’endroit est mauvais.

Il porta militairement la main à son képi et disparut dans les broussailles qui lui servaient de poste d’observation.

Pierre Laurier et Davidoff se remirent en marche, retournant vers la ville.

— J’envie le sort aventureux des hommes qui sont en butte aux menaces de ce brave gabelou. Ils courent, en ce moment, sur la mer, attentifs et circonspects, prêts au trafic ou à la bataille… Leur coup fait, ils répartiront pour une expédition nouvelle et des dangers inconnus… Ils ne pensent à rien qu’à leur dur et capricieux métier… Je voudrais être à leur place.

— Partez ! Le comte Woreseff, que j’accompagne à bord de