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sa pensée, que Clémence répondit, avec un sourire :

— Que voulez-vous ? Il faut bien se défendre !

Et, légère, elle redescendit l’escalier. Davidoff frappa à la porte, une voix répondit : «Entrez.» Il tourna le bouton et, auprès de la fenêtre ouverte, étendu au fond d’un large fauteuil, il vit Jacques les yeux creux, et les lèvres blêmes. En reconnaissant le docteur, le jeune homme devint un peu plus pâle, un nuage passa sur son front. Il se leva, et, allant à lui, lentement, il lui tendit la main :

— Vous m’en voulez ? dit-il.

— Un peu.

— Seulement un peu ? Je ne mérite pas tant d’indulgence. Je vous avais dit, cette nuit, que je suis un lâche. Eh bien ! vous en avez eu promptement la preuve.

Il parlait, les dents serrées, avec une amère crispation du visage. Il fit pitié à Davidoff, qui s’assit auprès de lui, et très affectueusement :

— Que s’est-il donc passé, depuis que nous nous sommes séparés, qui vous ait empêché de remplir votre engagement ? Il devait pourtant vous être doux de le tenir.

— Rien peut-il être doux pour moi ? répondit Jacques à voix basse. Tout ce que je fais est odieux et misérable. Un mauvais génie s’est emparé de moi et me souffle les pires résolutions.

— Résistez-lui. Écoutez-moi. Vous avez subi, il y a quelques heures, mon influence. Subissez-la de nouveau. Prenez un chapeau, un pardessus, et suivez-moi… Nous avons le temps de partir.

Jacques eut un geste de menace :

— Non, je ne veux pas m’éloigner d’ici…

— Ce que Clémence m’a dit est donc vrai ?