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IV

C’était le premier dimanche du carnaval et le théâtre de Nice splendidement illuminé, s’ouvrait pour le grand veglione. Depuis la place Masséna au centre de laquelle, sur son trône burlesque, depuis deux jours, avait été solennellement assis le roi Carnaval en habits pailletés, le hochet de la folie à la main jusqu’au péristyle du théâtre, une multitude de curieux, riant, criant, sifflant, regardait circuler les masques. L’orchestre rugissait de tous ses cuivres, et le rythme des valses et des quadrilles arrivait, en bouffées joyeuses, couvert par le murmure bourdonnant de la foule, qui roulait ses vagues, dans le vaste bâtiment livré, pour toute la nuit, aux caprices et aux fantaisies.

Dès l’entrée, ce n’était que buisson de plantes, sur lesquelles ruisselaient des lumières. Une élégante cohue de dominos multicolores, masqués ou le visage découvert, circulait dans les couloirs, les hommes et les femmes engagés dans de piquantes intrigues, dont les répliques volaient comme des flèches, au milieu des éclats de rire, des poursuites