Page:Ohnet – Noir et Rose, 1887.djvu/104

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ses auditeurs, le regard rivé sur lui par une sorte d’attraction surnaturelle, suivaient, pleins d’une admiration mêlée d’angoisse, le crescendo terrifiant de son inspiration. Dans son âme, exposée à nu, ils voyaient ses tristesses, devinaient ses amertumes, et comprenaient que les sons suaves ou déchirants qui frappaient leurs oreilles étaient faits du souvenir de ses joies passées et de la crainte de son malheur à venir. Mis en contact direct avec cette puissante nature d’artiste, ils palpitaient de toutes ses impressions, et jamais pareille émotion n’avait été éprouvée par eux.

Dans le salon réservé, seule avec sa sœur, Maud écoutait. Les premières notes lui avaient causé une sorte de suffocation. Ses nerfs s’étaient tendus, sa respiration avait sifflé, plus pénible, et Daisy avait eu peur. Mais, peu à peu, cette sensation dou-