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CHANT SECOND. 7

X.

Ce vallon était évité, pendant les ténèbres, par le serf crédule. La superstition racontait mainte histoire effrayante, et prétendait que des voix sinistres se faisaient entendre chaque nuit dans les sentiers. Lorsque les soliveaux de Noël petillent dans le foyer champêtre, ces récits prolongent la soirée ; la curiosité et la crainte écoutent avec un plaisir mêlé de tristesse, jusqu’à ce que la pâleur se répande sur les traits de l’enfance, et que la jolie villageoise perde aussi les roses de son teint. L’intérêt redouble, le cercle se rapproche peu à peu, et chacun jette derrière soi un regard tremblant lorsque le vent d’hiver gémit ou menace. Le vallon de Mortham est un lieu digne d’inspirer de tels récits : un mortel superstitieux qui, à une heure semblable, y aurait observé les pas précipités de Bertram, aurait pu croire que l’enfer avait laissé échapper l’ombre sanglante d’un meurtrier, et Wilfrid eût semblé une pâle victime destinée à lui servir de cortège.

XI.

Ce n’est pas seulement parmi les crédules habitans des hameaux que ces terreurs imaginaires se répandent ; il n’est point de rang qui soit exempt de cette maladie de l’esprits des cœurs aussi fermes que le bronze, aussi endurcis que le marbre, inaccessibles à la fois à l’amour et à la pitié, ont frémi comme le tremble flexible, sous son inévitable influence.

Bertram avait entendu raconter mainte histoire merveilleuse dans le lieu de sa naissance, et son âme ne pouvait secrètement se défendre de la crédulité de ses premières années. Sa jeunesse aventureuse n’avait pas moins ajouté foi à toutes les traditions qu’il avait apprises lorsque le vent des tropiques arrondissait la voile docile de son vaisseau, et que la lune des climats indiens prêtait la lumière argentée de son disque aux sentinelles de la nuit. C’est alors que les matelots aiment à s’entretenir des pré-