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76 ROKEBY.

sur le sombre lit de la Greta, les uns sont nus et arides, et les autres couverts d’une verdure. ondoyante. — Ici des arbres sortent de chaque fente, et balancent leurs feuillages touffus ; là les rocs anguleux s’élancent jusqu’aux nuages : souvent aussi le lierre les entoure comme d’une cotte-de-mailles, et couronne leurs âpres sommets de sa verte guirlande. Çà et là les rameaux flexibles flottent au milieu des airs, semblables à ces étendards arborés jadis sur les créneaux des tours féodales, pendant que les barons faisaient retentir les voûtes de leurs châteaux des acclamations de la joie. Telle est, plus bruyante encore, la voix mugissante de la Greta ; tels sont les échos de son rivage et les bannières verdoyantes qui flottent sur le cours de ses ondes.

IX.

Enfin, plus loin, les rochers s’écartent tout-à-coup de la rivière ; mais ils ne sont pas remplacés par une pelouse de gazon, ou par une de ces riantes plages qu’on trouve souvent après de semblables montagnes : asile solitaire, mais enchanteur, où l’imagination aime à se figurer qu’un pieux ermite, abandonnant sa cellule, vient réciter son rosaire. Mais ici on rencontre un bois de sombres ifs qui entrelacent leurs rameaux lugubres avec ceux du noir sapin, arbre des tombeaux. Il semble que cet ombrage est fatal à la terre qui le nourrit. Jamais ces lieux n’offrirent la douce verdure qu’aiment les fées bienveillantes ; aucun gazon, aucune fleur champêtre, n’y consolent les regards attristés. Le seul tapis qui couvre le sol est formé par les feuilles dont l’ouragan dépouille les branches flétries. Vainement le soleil dorait déjà les collines : le crépuscule régnait encore dans ce séjour sinistre, excepté sur l’extrême rive de la Greta, où quelques rayons s’égaraient à travers le feuillage. C’était un contraste bizarre que de voir l’ombre lugubre de ce ravin, et les brillantes nuances de l’aurore qui coloraient les festons du lierre sur le sommet de la montagne.