Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/69

Cette page n’a pas encore été corrigée

pensées d’une âme jadis trop hardie. Je fus forcé de chercher un autre toit ; ma licence fut condamnée dans son château, séjour de la sagesse : me donnait-il de l’or, je dissipais en un seul jour trois fois plus que je ne recevais. J’errai donc comme un proscrit, incapable de cultiver les champs ou de choisir un autre métier je devins tel que le fer d’une lance rouillé, qu’on regarde comme inutile et dangereux à la fois. Les femmes craignaient mes regards audacieux ; le citoyen paisible tremblait à mon approche ; le marchand, effrayé du feu de mes yeux, s’empressait de fermer son coffre-fort lorsqu’il voyait Bertram ; tous les lâches amis du repos s’éloignaient du fils négligé de la guerre.

XVIII.

— Mais enfin les discordes civiles donnèrent le signal, et mon métier de soldat fut le métier de tous. Rappelé par Mortham je revins conduire ses vassaux aux combats. Quel fut le prix de mon zèle ? Je ne pouvais vanter ma piété, ni répéter de saintes oraisons : de sombres fanatiques obtinrent toutes les faveurs ; et moi, déshonoré et dédaigné, je n’avais que l’heureux choix de courir au-devant de la mort… Tes gestes impatiens me disent que je ne t’apprends rien que tu ne saches déjà. Mais écoute-moi avec attention ; c’est un sentiment d’honneur qui me fait répéter toutes les circonstances qui ont précédé le destin de Mortham.

XIX.

— Les pensées qui ne s’échappent que lentement de nos lèvres, traversent le cœur avec la rapidité des éclairs. J’avais à peine enfoncé mes éperons dans les flancs de mon coursier, que j’avais déjà mis fin à mes incertitudes ; et, avant que nos escadrons se fussent mêlés, le sort de Mortham était arrêté. Je le suivis dans les vicissitudes de la bataille ; la victoire resta inconstante comme un jour de printemps, jusqu’à ce que, tel qu’un torrent qui a rompu ses digues, le prince Rupert fondit sur nos guerr