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ne cessent de varier l’aspect de l’astre des nuits ; sa lumière éclate et disparaît tour à tour sur les murailles du fort de Barnard et sur les ondes de la Tees (1) ; semblable au songe étrange qui trouble un coupable dont le remords et la peur assiègent le sommeil, la lune rougit soudain comme la honte, et bientôt elle semble brûler du feu plus sombre de la colère l’ombre que projettent les nuages va et vient comme les couleurs changeantes de la crainte ; enfin, les cieux semblent se cacher derrière un voile de deuil, et disparaissent dans les ténèbres, comme le désespoir.

La sentinelle de la tour antique de Baliol regarde en silence les reflets de la lumière sur les rives ombragées de la Tees ; elle observe les nuages qui s’amoncellent vers le nord, et écoute le bruit des gouttes de pluie qui tombent sur le faîte de la forteresse et sur les créneaux la voix lugubre des vents la fait frémir ; elle s’enveloppe dans les plis de son large manteau :

ii.

Les tours du château de Barnard, dont les ombres mobiles se dessinent sur l’onde fugitive, sont la demeure d’un châtelain qui, dans les incertitudes et les émotions confuses de son cœur, le dispute au désordre fantastique de la voûte des cieux.

Avant que le sommeil eût assoupi les sens du farouche Oswald, il avait plusieurs fois changé de position, et cherché vainement, par un pénible effort, à bannir ses noires pensées.

Le sommeil exauce enfin ses vœux ; mais il traîne à sa suite des souvenirs trop réels et des fantômes imaginaires qui mêlent ensemble, dans un désordre bizarre, le passé et l’avenir. La conscience, devançant les années, reproche déjà au châtelain un crime inutile, et appelle les furies, armées de leurs serpens et de leur fouet vengeur. Les transes de leur victime attestent les traits cruels qui la déchirent, et montrent quel est le repos qu’un coupable trouve dans sa couche solitaire.