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LLE

des Prussiens est teinte du sang des vaincus. Elles furent moins terribles ces clameurs que tu entendis quand les flots glacés de la Beresina furent rougis et fondus par le sang et la flamme, et que les milans du Don répétaient leurs sauvages hourras en te poursuivant. Non, ton oreille ne fut pas frappée d’un cri d’horreur plus sinistre quand, abandonné par toi,… — oui par toi,... le vaillant Polonais trouva le tombeau d’un soldat dans le fleuve de Leipsick, encombré de cadavres. Dans ces divers périls du passé, le destin te réservait d’autres leçons pour l’avenir, du dé fatal que tu viens de jeter ne dépend pas une seule bataille, une seule campagne !... ta gloire, ton empire, ta dynastie, ton nom, sont perdus à jamais ; et sur ta tête dévouée, la dernière goutte de l’urne fatale des vengeances célestes est répandue.

XVII.

Puisque tu veux vivre, ne refuse plus de courber la tête devant ces démagogues, naguère objets de ta haine et de tes mépris, qui vont livrer à de vains débats ta destinée impériale... Ou dirons-nous que tu t’abaisses moins en demandant un refuge à l’ennemi contre le sein duquel ta main dirigeait sans cesse ton glaive aux jours de ta prospérité ?

Un pareil hommage fut rendu autrefois par des héros de la Grèce et de Rome ; ton choix serait honorable, s’il était fait librement... — Mais viens sans crainte ; dans un homme descendu si bas, et dénué de tout secours, nous ne pouvons reconnaître un ennemi, quoiqu’une experience chèrement acquise nous force d’ajouter que jamais nous ne saluerons en toi un ami ! Viens toutefois ; mais ne conserve plus dans ton cœur ce germe d’orgueil qu’y découvrait dernièrement 1 un barde inspiré, l’espoir de ressaisir le sceptre impérial ; ne pense pas que nous laissions encore une fois l’ambition relever sa tête superbe ; viens sans crainte, mais aucune île ne t’appellera plus

(1) Lord Byron, Ode à Napoléon Bonaparte.