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DE WATERLOO. 381

IV.

Apercevez-vous dans ces lieux solitaires quelques traces des évènemens dont ils furent naguère le théâtre ? Un étranger pourrait répondre : — Cette plaine couverte de chaume parait avoir été récemment dépouillée de ses épis, et là de noires traces indiquent le passage des chariots pesans du laboureur, chargés des gerbes de la moisson. Sur ces larges monceaux de terrain foulés aux pieds, peut-être les villageois ont-ils formé de ces danses que Téniers aimait à dessiner ; là où le sol est noirci par la flamme ils ont préparé leur repas frugal, et la matrone du hameau a entretenu un feu de paille.

V.

Voilà ce que vous croyez ! voilà ce que croient tous ceux, qui voient ces lieux tels qu’ils sont en ce moment Mais d’autres moissons que celles qui réclament la faucille du laboureur ont été recueillies par des mains plus terribles, armées de la baïonnette, du sabre et de la lance. A chaque coup fatal des rangs entiers de héros tombaient comme les tiges dorées du froment : avant la fin du jour on vit çà et là des monceaux de cadavres : moisson terrible des batailles.

VI.

Regardez encore : cette place noircie vous indique le bivouac ; ces sillons profonds, les vestiges de l’artillerie tour à tour fatale aux deux armées. Non loin de cette vase durcie, le vaillant dragon précipita son coursier au milieu des torrens de sang. Ces excavations ont été produites par l’explosion de la bombe : ces vapeurs souillées que le soleil aspire de ce monticule, vous déclarent que le carnage s’y est rassasié de victimes.

VII.

Ah ! ce sont bien d’autres moissons que celles qui appellent la faucille, dont ces campagnes furent témoins ! La mort plana sur cette fête rurale, et le cri perçant des batailles invita les combattans à un banquet sanglant.

383 LE CHAMP DE BAT