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maine, il choisirait ces traits, ce regard et ce sourire amer. Pourrait-on jamais trouver dans les domaines de saint Cuthbert un chevalier qui osât combattre pour notre cause ce mauvais génie ? Apprenez-moi donc quelle réponse je dois faire ! C’est un crime d’accorder ce qu’il demande ; il y va de la vie si nous refusons.

VIII.

Vinsauf, le père chargé du cellier, s’était déjà, de bon matin, versé une coupe de malvoisie. Voici comment il opina : — Attendons jusqu’à demain pour donner la réponse du chapitre. Invitons Harold à un banquet, que le vin y coule à grands flots ; s’il est homme, il boit ; s’il boit, il est à nous. Des bracelets de fer orneront ses bras... Son lit sera dressé dans une de nos tours.

Ce saint moine avait un visage riant... O mes amis, ne vous fiez pas toujours à ces visages-là ! Vinsauf vidait volontiers une coupe remplie de vin ; il aimait la bonne chère et la gaieté... Jamais poète n’estima autant que moi un quartier de venaison et le jus brillant de la grappe ; mais, plutôt que de m’asseoir à table à côté de Vinsauf, quand le gibier viendrait de Bearpark, et le nectar de Bordeaux, je préférerais une galette et un verre d’eau de la Tyne, dans la cellule obscure d’un ermite.

IX.

Walwayn prit ensuite la parole. Savant dans l’art d’Esculape, il connaissait toutes les plantes que le soleil et la rosée font épanouir, mais surtout celles dont le suc a une fatale influence sur le sang et le cerveau. Le villageois qui le voyait, au clair de la lune, cueillant des simples sur le bord des ruisseaux, l’eût pris volontiers, à sa taille maigre et à sa marche mystérieuse ; pour un habitant de la tombe.

— Winsauf, dit-il, ton vin n’est pas sans vertu, nos chaînes sont pesantes, nos tours sont fortes : mais trois gouttes de ce flacon valent encore mieux que les cachots, les chaîne et le vin. Elles feront descendre Harold sous

32 HAROLD L’INDOMPTA