Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/151

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entendre les filles des grands ; jamais la vierge du hameau n’eut cette aisance et cette dignité qui inspirent à la fois le respect et la sympathie, et donnent tant de charme à la jeune châtelaine.

Peut-être les attraits de Matilde n’auraient pas suffi pour arrêter Edmond dans ses projets criminels ; mais lorsque la noble fille de Rokeby, se montrant supérieure à tous ses malheurs, emprunta de l’énergie de son âme un nouvel éclat et une nouvelle majesté, Edmond crut voir cet objet qui lui avait souvent apparu dans ses rêveries solitaires, lorsque ignorant encore le crime, il allait s’égarer dans les bois de Winston et sur les rives de la Tees : là son imagination s’était souvent plu à lui offrir les traits ravissans et la voix céleste d’une jeune princesse qui, dépouillée par le sort de ses honneurs et de ses états, attendait qu’un héros consacrât son épée victorieuse à la rétablir sur le trône de ses ancêtres.

xxvi.

— Telle était celle qui charmait mes songes, se dit-il à lui-même, et c’est moi qui viens ici préparer la cruelle destinée d’une châtelaine si belle, que mon imagination, n’a jamais rien, produit qui pût la surpasser ? Est-ce bien ma main qui a ouvert l’entrée de ce château à ses barbares ennemis…, à ces brigands qui ont brisé tous les liens de l’honneur et des lois, et dont le bienfait le plus doux est une mort soudaine ? Est-ce bien moi qui ai juré mille fois que si la terre possédait une beauté aussi céleste, j’irais jusqu’à ses dernières limites pour baiser avec amour les traces de ses pas ? Et aujourd’hui… Ah ! que la terre ne s’entr’ouvre-t-elle pas pour m’engloutir tout vivant !… N’y a-t-il plus d’espoir ? Tout est-il perdu ?… Hélas ! déjà Bertram est à son poste ! Je viens de voir son ombre glisser sous les voûtes du porche ! Il devait attendre mon signal… Il est possible de gagner du temps : j’ai entendu dire aux serviteurs de Matilde, que les soldats de Wicliffe doivent se rendre ici… Un cri d’alarme pourrait hâter