Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/141

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d’O’Neale, et lui dit : — C’est la volonté du ciel !… Crois-tu, Redmond, que je puisse m’éloigner sans douleur du château de mes ancêtres, et abandonner au dieu des ruines tout ce qui a fait le charme de mes jeunes années ? C’est ici que Matilde a trouvé tous ses plaisirs dans la douce paix du bonheur domestique. Ce foyer où mon père s’est assis tant de fois sera bientôt occupé par un étranger ; tous les appartemens, témoins des jeux de mon enfance, auront peut-être bientôt disparu ; la ronce et les broussailles en effaceront jusqu’aux traces, ou du moins ils auront cessé d’être la demeure de la postérité des Rokeby !… Ce qui doit nous consoler, ô Redmond !… c’est de penser que telle est la volonté du ciel.

Ses paroles ; l’accent de sa voix et son regard exprimaient la tendre amitié des premiers âges du monde ; la froide réserve avait perdu tout son pouvoir sur Matilde, qui s’abandonnait à la sympathie du malheur. Redmond n’osa pas hasarder une réponse ; mais, s’il avait eu à choisir entre cette heure de mélancolie et les honneurs dont jadis jouissaient ses ancêtres, Redmond eût renoncé à jamais aux riches domaines de Slieve-Donard et de Clandeboy.

xii.

La pâleur couvre les traits de Wilfrid ; Matilde s’en aperçoit, et se hâte d’ajouter : — Heureuse du moins par l’amitié, je dois m’abstenir de tout murmure !… La fille de Rokeby trouve une douce distraction à ses regrets en quittant le château de ses pères ! Cette nuit encore, avant que je m’éloigne, ce foyer hospitalier recevra, comme jadis, le malheureux sans asile, et ce pauvre ménestrel nous charmera par d’antiques ballades. Qu’Harpool se hâte d’ouvrir la porte ; qu’il accueille bien cet étranger, et restaure ses forces par un bon repas… Cependant le généreux Wilfrid va prendre sa harpe et nous ravir par une de ses romances !… Je l’exige de vous, Wilfrid… Cessez d’avoir cet air de tristesse ! Je devine votre pen-