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208 MARMION.

les piqueurs parcouraient à pas lents le plus épais du bois ; les fauconniers tenaient leurs faucons prêts à prendre l’essor, et les forestiers, en élégant costume vert, conduisaient en lesse le lévrier rapide, pour le lancer sur le gibier que faisait partir le chien couchant. — Soudain la flèche siffle et vole, l’arquebuse lui répond, tandis que la colline répète de rochers en rochers le bruit des chevaux, les aboiemens des chiens, les cris des veneurs et les joyeuses fanfares du cor.

Le souvenir de ces nobles plaisirs survit encore dans nos vallées solitaires, sur les bords de l’Yarrow et dans l’épaisse forêt d’Ettrick, qui fut long-temps l’asile d’un redoutable proscrit. Mais cette cour, qui venait ainsi parcourir les forêts, était moins heureuse que nous dans nos parties de chasse. Plus modestes, nos plaisirs n’ont ni pompe ni éclat ; mais notre gaieté, cher Marriot, n’en est pas moins vive. Tu te rappelles mes excellens lévriers : jamais on ne les mit en défaut dans le bois ou sur la colline ; jamais chiens n’eurent plus d’ardeur et une bouche plus sûre. Les intervalles qui se passaient entre nos chasses n’étaient jamais tristes, car, pour nous distraire, nous avions toujours en réserve quelque poète de l’antiquité ou des temps gothiques ; nous admirions les scènes imposantes que la nature déployait à nos yeux ; nous redisions les vers qu’elles rappelaient à notre mémoire ; nous ne traversions pas une allée, pas un ruisseau qui n’eût sa légende ou sa ballade. Et maintenant tout est muet… ton château est désert, ô Bowhill ? Le laboureur n’entend plus le fusil du chasseur retentir sur la montagne ; on ne le voit plus, ému au souvenir de l’héritage de ses pères, verser à la ronde de joyeuses rasades, et boire au Chef des collines. Elles ne sont plus ces fées mortelles qui habitaient les bosquets de l’Yarrow, parcouraient ses avenues et cultivaient ses fleurs ; fées aussi belles que les esprits dansant au clair de la lune sur Carterhaugh et aperçus par la superstitieuse Jeannette. On ne voit plus le jeune baron qui animait les bois solitaires de Shériff, et imitait, par son ton et sa démarche mâle, la majesté d’Oberon. Elle est partie cette noble dame dont la beauté était le moindre attrait ; et cependant si la reine des sylphides eût voulu montrer à la terre tous ses charmes célestes, elle n’eût pu traverser les airs avec une taille plus légère et des traits plus gracieux. L’oreille in-