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CHANT SECOND.

Le Couvent.

AU RÉVÉREND JOHN MARRIOT, M. A.
Ashestiel, Ettrick Forest.


Elles sont maintenant désertes et dépouillées ces plaines où s’élevait jadis une forêt antique ! ils sont dévastés ces vallons autrefois couverts d’épais taillis, et peuplés de cerfs et de daims ! Cette aubépine… qui peut-être voit depuis plus de trois siècles ses rameaux hérissés de piquans ; cette aubépine solitaire, que ne peut-elle nous dire tous les changemens du sol qui l’a vue naître, depuis que, modeste rejeton, sa tige, aujourd’hui si robuste, fléchissait au gré de chaque brise ! Que ne peut-elle nous dire : — Là le chêne altier couvrait la terre de son ombre gigantesque, plus loin le frêne tapissait le rocher de sa verdure, et dominait le taillis avec ses feuilles étroites et les rouges grappes de ses baies. Alors les pins couronnaient la montagne ; le bouleau se balançait dans la plaine ; le tremble frémissait au moindre vent, et le saule ombrageait les ruisseaux. —

Il me semble l’entendre dire encore : — Le cerf altier est venu se reposer sous mon ombre, au milieu du jour ; j’ai vu le loup plus farouche (et la vallée voisine porte encore son nom) errer autour de moi, la gueule altérée de carnage, et hurlant à la clarté de la lune ; le sanglier belliqueux aiguisait ses défenses contre mon écorce, tandis que le daim et le chevreuil bondissaient à travers le taillis. Souvent j’ai vu les monarques d’Ecosse sortir de la tour crénelée de Newark, suivis de mille vassaux ; les chasseurs, l’arc tendu, gardaient toutes les issues de la forêt ;