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MARMION

bâti ce fort, les gens d’église nous visitent rarement. Notre chapelain lui-même n’est plus revenu depuis le dernier siège ; il ne pouvait se contenter de la ration pour chanter la messe, et il s’est réfugié dans la cathédrale de Durham, afin de prier Dieu pour nous sans courir aucun risque.

Notre vicaire de Norham est, par malheur, trop bien ici pour monter à cheval.

L’abbé de Shoreswood….. celui-là vous dompterait le coursier le plus fougueux de votre troupe, mais il n’y a pas de porte-lance au château qui sache mieux que lui jurer, chercher querelle, et même donner un coup de poignard.

Le frère Jean de Tillmouth serait mieux votre homme : bon vivant à table, bienvenu partout, il connaît tous les châteaux et toutes les villes où l’on boit du bon vin et de la bonne ale, depuis Newcastle jusqu’à Holyrood ; mais hélas ! le pauvre homme ! il ne quitte guère plus l’enceinte du château depuis le jour où sa mauvaise étoile lui fit traverser la Tweed, pour aller apprendre le Credo à la dame Alison. Le vieux Bughtrig le surprit avec sa femme ; et frère Jean, ennemi des querelles, décampa au plus vite, oubliant froc et capuchon : le rustre jaloux a juré que, s’il revient, il n’aura plus personne à confesser. Je crois le frère peu désireux de le rencontrer ; cependant il est possible qu’il se hasarde à sortir sous votre protection.

xxii.

Le jeune Selby, debout près de la table, découpait les mets pour son oncle et son hôte ; il prit respectueusement la parole et dit :

— Mon cher oncle, quel malheur ce serait pour nous, s’il arrivait quelque mésaventure au frère Jean ! C’est un homme si gai ! Il n’est ni jeu ni bon tour qu’il ne sache : qui est plus adroit que lui au trictrac et aux boules ? qui chanterait comme lui ces chansons si comiques, lorsque la neige de Noël nous fait trouver le temps si long auprès-