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CHANT SECOND.

brillait comme la clarté pure des cieux ; elle éclaira le visage pâle du moine et son capuchon, la cotte de mailles et le panache flottant du guerrier.

xix.

Le magicien se présenta à leurs yeux comme s’il n’avait jamais cessé de vivre. Les flots d’argent de sa barbe blanche attestaient qu’il avait vu plus de soixante-dix hivers. Il était couvert d’une aumusse et d’un baudrier de Tolède, comme un pèlerin arrivant d’outre-mer. De la main gauche il tenait son livre de magie, de la droite une croix d’argent, et la lampe brûlait à ses pieds : il avait encore cet air fier et majestueux qui avait fait trembler les esprits les plus redoutables, et son visage était si serein qu’ils espérèrent que son âme avait trouvé grâce.

xx.

Souvent William Deloraine avait parcouru le théâtre sanglant des combats, souvent il avait foulé aux pieds les cadavres des guerriers, toujours sans crainte et sans remords ; mais les remords et la crainte s’emparèrent de lui quand il vit cette étrange apparition. Respirant à peine, les yeux obscurcis et troublés, il resta immobile et sans force. Le moine se mit à prier avec ferveur et à haute voix, en détournant la tête : il ne put soutenir la vue de celui qu’il avait chéri avec une affection fraternelle.

xxi.

Lorsqu’il eut achevé les prières des morts : — Hâte-toi, dit le moine à Deloraine, hâte-toi de terminer ce que tu as à faire, ou nous pourrions payer bien cher notre audace, car tu ne peux voir ceux qui s’assemblent autour de cette tombe entr’ouverte. — Alors le chevalier, frappé de terreur, prit de la main froide du magicien le livre tout-puissant, relié en fer et fermé par des agrafes de même métal. Il crut voir le mort froncer le sourcil ; mais l’éclat de la lumière qui sortait du sépulcre avait peut-être ébloui les yeux du guerrier.